Véhicules électriques : l'emballement est-il réaliste ?

Abandon du diesel, fin des moteurs thermiques, multiplication des annonces autour de l'électrique : il ne règne pas un climat de folie dans le monde de l'automobile. 

Un an après le Dieselgate, en 2016, Volkswagen avait annoncé un plan stratégique pour 2025, dont l'un des piliers était déjà le véhicule électrique. Il était question de 30 modèles zéro émission à cette date pour l'ensemble du groupe, qui comprend une douzaine de marques. Au dernier salon de Francfort, c'est une autre feuille de route encore plus ambitieuse qui a ét dévoilée. Le groupe parle maintenant de 50 modèles 100% électriques en 2025 et d'une version électrifiée de chacun des 300 modèles de l'ensemble des marques, en 2030. Pour accompagner cette transition, Volkswagen va dépenser beaucoup d'argent : 20 milliards d'euros pour la recherche et la production de tous ces modèles, mais aussi 50 milliards pour financer 4 usines géantes de batteries. C'est aussi une façon pour le groupe allemand de montrer qu'il peut faire encore plus fort que Tesla et que tous les constructeurs réunis, en mettant ces 70 milliards d'euros sur la table. A l'horizon 2025, son objectif est de vendre 3 millions de véhicules électriques dans le monde, dont la moitié en Chine. 

D'autres Allemands ont aussi fait preuve d'optimisme, comme BMW qui annonce 25 modèles électrifiés d'ici 2025, dont 12 purement électrique, avec une proportion des ventes qui devrait atteindre 15 à 20% à cet horizon. Mercedes indique pour sa part une électrification de toute sa gamme à partir de 2022. Cela veut dire qu'à des degrés divers (Stop & Start amélioré en 48 volts, hybride rechargeable et 100% électrique), les véhicules du groupe Daimler vont sensiblement réduire leur empreinte CO2 tout en continuant sur certains d'entre eux à faire le plein à la pompe. 

Il y a eu d'autres annonces de ce tpe, avec Honda qui va intégrer aussi systématiquement un moteur électrique (en plus du thermique) sur ses nouveaux modèles en Europe. Comme on le voit, la plupart des constructeurs, y compris PSA et Renault, vont électrifier leurs modèles. L'alliance Renault-Nissan-Mitsubishi prévoit ainsi 12 nouveaux modèles électriques d'ici 2022 et une majorité de véhicules hybrides, qui vont bénéficier d'un partage de composants (moteur, batteries). 

Le tout est de savoir ce calendrier est vraiment plausible. C'est vrai que des signes sont donnés à travers le monde d'une volonté de mettre fin à terme au moteur thermique. Le dernier pays à l'avoir fait est la Chine. Mais, les experts restent sceptiques. Comment va-t-on produire l'électricité nécessaire pour alimenter tous ces véhicules ? Quid des terres rares et du recyclage des batteries ? Comment va-t-on résoudre le problème des bornes et du temps de charge ? Personne aujourd'hui n'apporte de réponse à ces questions essentielles. On a le sentiment que c'est surtout de la communication, pour faire oublier le scandale du Diesel. 

Le PDG de PSA, Carlos Tavares, est le seul à avoir eu le courage de briser l'omerta et mettre en garde contre ce qu'il appelle " la course folle au véhicule électrique ". Lors d'échanges avec la presse à Francfort, il n'a pas hésité à dire que l'écosystème global de la voiture électrique pourrait ne pas être aussi vertueux qu'on le croit. Il a également insisté sur l'aspect industriel stratégique pour l'Europe qui est en jeu, face à la puissance chinoise dans ce domaine. En conclusion, le patron de PSA pronostique que l'électromobilité pourrait figurer au banc des accusés dans 10 ans, au même titre que les moteurs thermiques aujourd'hui.