(Paris, le 13 juin 2022)
Depuis le vote du Parlement européen, le 8 juin 2022, sur l’arrêt de la vente de véhicules thermiques en 2035, il est acté que l’Europe sera donc le premier continent à passer résolument au 100 % vert. Cette initiative très forte, qui suscite beaucoup d’interrogations et d’inquiétudes dans la filière automobile, sera-t-elle isolée sur l’échiquier international ?
Qu’en est-il en fait des autres pays ? C’est à cette question, que vient d’essayer de répondre la société d’avocats De Gaulle Fleurance & Associés, en partenariat avec l’Avere-France (association nationale pour le développement de la mobilité électrique).
Leur premier Observatoire des Transitions énergétiques, publié tout début juin à cette occasion, montre d’une part que les stratégies varient d’un pays à un autre, mais que la tendance à l’électrification des mobilités touche le monde entier. A preuve, en 2021, la voiture électrique représentait 12 % du marché automobile mondial, avec 6 millions de véhicules à la route (+ 100 % par rapport à 2020). Trois grandes régions dominent ce marché : la Chine (3,1 millions), les Etats-Unis (1,4 million) et l’Europe (1,2 million).
Si la tendance à l’électrification de la mobilité est uniforme, les moyens d’y parvenir sont différents d’un pays ou d’un continent à l’autre. Tour d’horizon :
• En Chine, la stratégie adoptée oblige les groupes automobiles à vendre au minimum 10% d'électrique et impose que 10 % des places de stationnement des parkings publics soient équipés de chargeurs. Les aides sont concentrées sur les consommateurs (plaques d’immatriculation gratuites, remboursements d’impôts…), qui n’ont pas besoin de demander un permis pour installer une infrastructure de recharge. La Chine a en revanche mis fin à sa politique d’aides aux constructeurs. Le pays est aujourd’hui le premier marché mondial pour la voiture électrique.
Incitations financières vs mesures obligatoires en faveur du véhicule électrique
• En Allemagne, la stratégie retenue par les autorités mixe incitations financières et mesures facilitant l’usage de la voiture électrique. Comme dans d’autres pays (la France notamment), l’achat de véhicules électrifiés est subventionné par un bonus écologique. Quant aux aides pour le développement des infrastructures de recharge, elles concernent à la fois le secteur public et le privé. Toutefois, selon De Gaulle Fleurance & Associés, l’Allemagne va plus loin que la France au niveau des incitations non monétaires, avec des places de parking dédiées ou le droit d’emprunter les couloirs de bus. Un verdissement des flottes de la commande publique est aussi encouragé, avec l’objectif de 20 % des véhicules appartenant à l’État en électrique. Au 1er trimestre 2022, 24,4 % des véhicules nouvellement immatriculés étaient des véhicules électriques.
• Pour soutenir le développement de la mobilité électrique, l’Inde a résolument mis le cap sur les incitations financières. Des subventions sont destinées aux consommateurs, tandis que les autorités soutiennent financièrement la fabrication de véhicules électriques et promeuvent la production de batteries. Les propriétaires de véhicules électriques bénéficient ainsi d’un crédit d’impôt à hauteur de 1 800 € ; ils sont exonérés de péages sur autoroutes et des taxes sur le renouvellement de leur immatriculation. Le ministère de l’Energie a par ailleurs limité, jusqu’en mars 2025, le prix de l’électricité des bornes de recharge ouvertes au public et met à disposition des terrains publics pour l’installation de stations de charge. Les aides aux constructeurs favorisent la R&D et ont conduit à l’explosion du nombre de fabricants de véhicules électriques (plus de 400 en 2022). Près d’1,2 million de véhicules électriques ont été enregistrés l’année dernière, soit le double de 2020, mais les ventes ne représentent que 1,2 % des voitures vendues en 2021-2022.
• L’Arabie Saoudite veut également être une terre propice à la mobilité électrique. Dès 2018, l'Organisation Saoudienne de Normalisation, Métrologie et Qualité (SASO) a établi une réglementation sur les véhicules électriques, permettant leur importation pour un usage personnel. L’initiative « Saudi Green » prévoit d’atteindre 30 % de véhicules électriques en circulation à Riyadh d’ici 2030. La Saudi Electricity Company a signé un accord avec des fabricants japonais afin de déployer des bornes de recharge électrique rapide.
Cap sur les bornes de recharge pour soutenir la mobilité électrique
• La Turquie a mis le cap sur un déploiement massif des bornes de recharge rapide. Un règlement publié en mars 2022 prévoit des subventions « non remboursables » à hauteur de 75% des coûts d’installations. Il n’y a en revanche aucun mécanisme d’incitation spécifique pour l’achat de véhicules électriques.
• La Pologne mixe les dispositifs pour accélérer la mobilité électrique : obligations, incitations financières et mesures non monétaires facilitant l’usage de ces véhicules. Pour augmenter le nombre de stations de recharge publiques, chaque commune de plus de 100 000 habitants a l’obligation d’installer au moins 60 stations de recharge publiques. Côté facilitation, aucun permis de construire n’est exigé pour installer des stations et des points de recharge. Depuis le 1er janvier 2022, l’administration et les unités gouvernementales locales doivent avoir au moins 10 % de véhicules électriques dans leur flotte de voitures. Les véhicules électriques bénéficient en outre d’un certain nombre d'avantages, tels que la gratuité du stationnement sur la voie publique. Côté incitations, le programme "My EV" (Mój elektryk) soutient l'achat ou la location de véhicules à émission zéro, via des subventions. En mars 2022, 43 465 voitures électriques étaient enregistrées en Pologne, dont 50 % de véhicules entièrement électriques. Elles n’étaient que 39 658 fin décembre 2021 et 19 714 à la fin de 2020. La Pologne compte plus de 2 000 stations de recharge de véhicules électriques accessibles au public (et près de 4 000 points individuels).