SAft giga factory

(Paris, le 2 avril 2021)

L’Europe veut plus que jamais reprendre la main sur les batteries. la Commission a autorisé le 26 janvier le versement de 2,9 milliards d'euros d'aides publiques pour un deuxième projet commun (IPCEI) à douze Etats membres, dont la France, l’Allemagne et la Suède.

Ce programme, appelé European Battery Innovation, implique près de 42 entreprises, parmi lesquelles les constructeurs automobiles BMW et Tesla, ainsi que Fiat – désormais au sein du groupe Stellantis – et la jeune société suédoise Northvolt, qui travaille déjà à la construction de plusieurs usines de production de cellules de batteries sur le Vieux Continent. En plus des 2,9 milliards d’euros de fonds publics, les pays-membres espèrent débloquer 9 milliards d'euros auprès d'investisseurs privés. L’objectif est ainsi de couvrir l'ensemble de la chaîne de valeur, de l'extraction des matières premières jusqu’au recyclage.

Ce nouveau projet s’inscrit dans la lignée d’un premier projet d’« Airbus des batteries », pour lequel la Commission européenne avait déjà débloqué 3,2 milliards d’euros fin 2019. Il regroupe sept Etats membres avec une vingtaine d’entreprises, dont l’ex-groupe PSA et Saft (à travers leur société commune Automotive Cells Company), ainsi que BASF et Solvay.

L’ambition est de constituer une alternative aux Asiatiques qui dominent le marché : les fabricants chinois CATL et BYD, ainsi que le japonais Panasonic et les sud-coréens LG-Chem et Samsung-SDI. Précisons au passage que certains de ces acteurs ont déjà prévu de lancer des usines en Europe, comme CATL en Allemagne, ou encore LG, SK Innovation et Samsung en Europe centrale.

Indépendamment de ces projets, les constructeurs essaient de contrôler le business de la batterie. Le plus ambitieux est Volkswagen, qui a impressionné lors de son « Power Day » le 15 mars. Le groupe a annoncé la création de 6 giga factories en Europe d’ici 2030, avec une valeur énergétique totale de 240 GWh par an. Les deux premières usines seront installées dans la ville suédoise de Skellefteå (avec Northvolt*) et à Salzgitter, en Allemagne. La production de ces cellules devrait débuter en 2023 pour atteindre progressivement une capacité annuelle de 40 GWh. Plus tard en 2025, ce même site va produire un nouveau type de cellule unifiée, destinée à réduire les coûts (50 % sur l’entrée de gamme, 30 % sur les véhicules à grands volumes), qui fera par ailleurs l’objet d’innovations en matière de stockage et de charge rapide.

VW espère ainsi mieux rivaliser avec Tesla, son concurrent de référence (qui a un projet de gig factory à Berlin. Chez les autres constructeurs allemands, Daimler est aussi impliqué dans la production de batteries à travers sa filiale Accumotive. Le groupe a prévu de mettre sur la table 1 milliard d’euros pour disposer à terme d’un réseau de neuf usines de batteries en Europe, en Amérique du Nord et en Asie. Pour sa part, BMW a revu à la hausse ses ambitions. Il entend écouler quelque 10 millions de voitures entièrement électriques au cours des dix prochaines années, alors qu'il ambitionnait d'en vendre 4 millions jusqu'à présent. Toutefois, la firme de Munich n’a pas de projet pour lancer de giga usines. Elle se repose sur ses fournisseurs.

Et les Français ? Le groupe PSA est le plus volontariste. Après avoir lancé un centre de R&D à Bordeaux et un site pilote à Nersac (Charente) avec Total pour permettre la mise au point de nouvelles technologies de cellules lithium-ion de haute performance, le déploiement se prépare. A l’issue de cette phase de R&D, la production en série est prévue d’être lancée dans deux Giga Factories », à Douvrin (Pas-de-Calais) en France puis à Kaiserslautern en Allemagne. L’objectif est d’arriver à une capacité de 8 GWh dans un premier temps pour atteindre à l’horizon 2030 une capacité cumulée de 48 GWh sur l’ensemble des deux sites. Cela correspondra à la production de 1 million de véhicules électriques par an, soit plus de 10 % du marché européen. Renault n’a pas vraiment l’intention de rejoindre ce projet, même si la proposition lui a été faite. La marque au losange n’a d’ailleurs pas pris la parole sur ce dossier de l’Airbus des batteries. Mais, il y a au moins un autre projet dans l’hexagone avec Verkor. Il s’agit d’une start-up grenobloise qui sera aux commandes d’une nouvelle Giga factory nationale, avec l’appui de Schneider Electric, EIT InnoEnergy et du Groupe IDEC. Et on parle aussi de l’arrivée du chinois Envision, qui a racheté à Nissan la société AESC qui produisait des batteries pour la marque japonaise.

(*) Lequel annonce une commande de 14 milliards d’euros de la part de Volkswagen.