Avantages en nature : réponses aux 10 questions que vous vous posez sur la réforme des AEN

Fiscalité 31 Mar 2025

Les règles sur le calcul des avantages en nature (AEN) liés aux véhicules de fonction ont été profondément modifiées par l’arrêté du 25 février 2025. Les véhicules thermiques comme 100 % électriques sont concernés, avec une rétroactivité au 1er février 2025. Toutefois, comme pour chaque nouvelle réglementation, l’application pose des questions au sein des entreprises. Que se passe-t-il en cas de réaffectation d’un véhicule ? Et lorsqu’un véhicule électrique obtient l’éco-score après son immatriculation ? Quid de la prise en compte de la recharge pour les véhicules électriques « non éco-scorés » ?

Le Bulletin Officiel de la Sécurité Sociale a récemment été mis à jour afin de clarifier certaines applications. Nous avons recensé ci-dessous les 10 questions les plus fréquemment posées sur cette réforme afin d’y apporter des éléments de réponse. Décryptage…

 

Retrouvez l’intégralité de notre article sur la réforme des AEN ici.

 

1. Lors de la réaffectation d’un véhicule déjà en parc à un nouveau collaborateur, la nouvelle règle des AEN s’applique-t-elle ?

Le Bulletin officiel de la sécurité sociale a précisé le 12 mars 2025 la notion de réaffectation d’un véhicule pour l’application des nouvelles règles : « Le véhicule est considéré mis à la disposition du salarié à compter de la date d’attribution fixée par l’accord conclu entre l’employeur et le salarié. »

  1. Ainsi, un véhicule acheté par l’entreprise, qu’il soit thermique ou électrique, et attribué à un salarié A avant le 1er février 2025, bénéficie des anciennes dispositions.
  2. Si ce véhicule est ensuite restitué par le salarié A et attribué en avril 2025 à un salarié B, les nouvelles règles de l’AEN s’appliquent.
  3. De même, si le salarié A se voit attribuer un nouveau véhicule à compter du 1er février, ce sont les nouveaux taux qui devront intervenir.

 

2. La règle de calcul des AEN sur le loyer est-elle toujours plafonnée par la règle sur le prix d’achat comme auparavant ?

En l’état, le BOSS précise que « l’évaluation ne peut pas avoir pour effet de porter le montant de l’avantage en nature à un niveau supérieur à celui qui aurait été évalué si l’employeur avait acheté le véhicule ». Le prix de référence retenu pour cette évaluation est le prix d’achat TTC du véhicule par le loueur, après prise en compte du rabais consenti, le cas échéant, dans la limite de 30 % du prix conseillé, par le constructeur au jour du début du contrat.

Il appartient aux loueurs et crédit-bailleurs de communiquer aux entreprises locataires les éléments nécessaires à l’application de ces règles. En l’absence d’une telle information, le prix retenu sera le prix conseillé d’achat du véhicule par le constructeur au jour du début du contrat de location.

 

3. Je souhaite passer d’une évaluation forfaitaire au réel. Quand puis-je le faire ?

Lorsque l’employeur met un véhicule à disposition de son salarié, son utilisation privée constitue un avantage en nature évalué forfaitairement ou calculé sur la base des dépenses réellement engagées. L’option est toujours laissée au choix de l’employeur. Celui-ci a la faculté de changer d’option en fin d’exercice annuel en fonction de son choix pour l’année entière écoulée, salarié par salarié. L’employeur qui choisit de changer d’option en fin d’année régularise, le cas échéant, les cotisations précomptées au cours de l’année. S’agissant d’une option qui doit être exercée au plus tard lors de la dernière déclaration afférente à l’exercice, l’employeur ne peut en revanche en revendiquer rétroactivement le bénéfice pour les années antérieures.

 

4. Les pneumatiques font-ils toujours partie de l’assiette de calcul des AEN alors que l’arrêté du 25 février mentionne uniquement « Loyer / Entretien / Assurance » ?

L’arrêté du 25 février 2025 n’apporte pas de modification à ce sujet. Le Bulletin Officiel de la Sécurité Sociale (BOSS) précise que les frais d’entretien comprennent les frais courants : révisions, changements de pneus, de pot d’échappement ou d’ampoules, vidanges, lavages, etc. Ne doivent pas être pris en compte les frais de remise en état consécutifs à un sinistre.

 

5. Les frais de carburant intègrent-ils aussi les frais à des fins personnelles ?

Le BOSS précise que le carburant pris en compte dans l’évaluation de l’AEN inclut les frais à des fins professionnelles et personnelles. Soit au réel (sur facture), soit par le biais de l’évaluation forfaitaire :

  • avant le 1er février 2025 : 12 % dans le cadre d’un achat, 40 % dans le cadre d’une location ;
  • à partir du 1er février 2025 : 20 % dans le cadre d’un achat, 67 % pour une location.

 

6. Si un modèle 100 % électrique obtient la certification éco-score après son immatriculation et sa mise à disposition auprès du collaborateur, puis-je lui appliquer l’abattement de 70 % prévu pour les véhicules éco-scorés ?

Le BOSS précise que l’éco-score est établi à la date de mise à disposition du véhicule au salarié. Si un véhicule obtient donc l’éco-score après avoir été mis en circulation, il ne pourra toujours pas bénéficier de l’abattement de 70 % sur les AEN. Ici, c’est la carte grise qui fait foi.

 

7. Un véhicule électrique non éco-scoré profite-t-il de l’exclusion de la prise en charge des frais de recharge, au même titre qu’un véhicule électrique éco-scoré ?

Pour les véhicules électriques qui ne respectent pas l’éco-score minimal, l’évaluation de l’AEN est effectuée sur la base des barèmes applicables aux véhicules thermiques, hors frais de carburant. Car cette évaluation ne doit pas tenir compte des frais d’électricité engagés par l’employeur pour la recharge du véhicule.

 

8. Où puis-je retrouver la liste des véhicules éco-scorés ?

Après être devenu un critère d’éligibilité au bonus écologique en 2024, le score environnemental automobile devient un paramètre d’arbitrage pour de nombreuses mesures, comme ici l’application d’un abattement sur les AEN. Un site mis en place par l’Ademe permet de retrouver la liste des véhicules éco-scorés à ce jour.

Pour vérifier si un modèle est éco-scoré, munissez-vous de son « Type-Variante-Version » - ou code TVV. Ce code alphanumérique identifie les caractéristiques techniques comme la masse en charge maximale techniquement admissible, le nombre maximal de places assises, la consommation d’énergie électrique… Il est défini par le constructeur à l’homologation.

Un même modèle de voiture particulière peut présenter jusqu’à plusieurs dizaines de TVV différents. Ce code est renseigné en case D.2 du certificat d’immatriculation et sur le certificat de conformité CE du véhicule. Pour s’assurer qu’un certain modèle correspond bien à un TVV éligible, il est possible de se renseigner auprès d’un opérateur de marché ou du constructeur.

 

9. Quels sont les différents cas d’application pour la recharge à domicile ?

Pour répondre à cette question, le BOSS propose trois exemples :

Exemple 1 : Un employeur met à disposition d’un salarié un véhicule électrique de fonction. Il dépense 2 800 € pour l’installation d’une borne à domicile qui sera restituée à l’employeur à la fin du contrat de travail. L’employeur prend en charge 400 € par an au titre de dépenses de maintenance et d’entretien de la borne.

Jusqu’au 31 décembre 2027 :

  • L’ensemble des frais d’électricité engagés par le salarié peut être pris en charge par l’employeur sans intégration dans l’assiette sociale, puisqu’il s’agit d’un véhicule 100 % électrique mis à disposition par l’employeur pour un usage à la fois professionnel et privé.
  • Le montant de l’AEN constitué par l’installation d’une borne de recharge électrique au domicile du salarié est exclu de l’assiette sociale dès lors que la borne est restituée à la fin du contrat de travail.
  • 50 % de la prise en charge par l’employeur des dépenses de maintenance et d’entretien de la borne doivent être réintégrés dans l’assiette des cotisations et contributions sociales, soit 200 € par an (400 x 50 %).

Exemple 2 : Un employeur dépense 2 800 € pour l’installation d’une borne neuve au domicile d’un salarié en janvier 2025. Un an plus tard, le salarié démissionne et son employeur lui laisse la borne installée à son domicile. Un avantage en nature de 1 775 € doit être intégré dans l’assiette des cotisations et contributions sociales (2 800 € – (2 800 € x 50 % dans la limite de 1 025 €)).

Exemple 3 : Un employeur souscrit un contrat de location pour permettre à un salarié d’utiliser une borne de recharge à son domicile.

Le premier mois, l’employeur prend en charge la totalité du coût de la location, qui s’élève à 140 € (120 € de contribution initiale liée à l’installation de la borne, 20 € de frais courants liés à l’entretien de la borne). Un avantage en nature de 70 € (140 € x 50 %) doit être intégré dans l’assiette des cotisations et contributions sociales au titre du premier mois.

Les mois suivants, le coût de la location s’élève à 20 €, auxquels s’ajoutent les frais d’alimentation électrique variables qui restent à la charge du salarié. Un avantage en nature de 10 € (20 € x 50 %) doit être intégré dans l’assiette sociale.

 

10. Si j’applique une participation de 100 % du montant de l’AEN, lors du passage d’un véhicule thermique à un véhicule électrique, cette participation diminue et le TCO pour l’entreprise augmente à loyer équivalent. Puis-je alors augmenter la participation au-delà du montant de l’AEN pour compenser la hausse du TCO ?

Pour répondre à cette question, nous avons interrogé le cabinet Peren avocats. Les spécialistes expliquent : « Certaines sociétés octroient à des salariés des véhicules utilisables à des fins privées, constituant donc un avantage en nature, et sollicitent de ces salariés le paiement d’une redevance équivalente à la valeur de l’AEN, de sorte que celui-ci n’est pas valorisé dans l’assiette des cotisations sociales. Dans le cas où une entreprise souhaiterait demander une redevance supérieure à l’AEN pour couvrir ses frais administratifs liés à la gestion de parcs de véhicules, d’une part, et un surenchérissement du coût global de location, d’autre part, cela semble incompatible en matière de droit du travail. En effet, si aucune règle légale ou de jurisprudence n’a été identifiée, cette pratique contreviendrait à plusieurs principes généraux.

En premier lieu, l’employeur doit rembourser à ses salariés leurs frais professionnels. Il a l’obligation de prendre en charge les frais engagés par le salarié pour les besoins de son activité professionnelle ; ces frais ne peuvent pas être imputés sur sa rémunération (Cass. Soc. 25 février 1998 n° 95-44.096 ; 25 mars 2010 n° 08-43.156).

De même, il est interdit d’opérer une retenue sur salaire destinée à effectuer une compensation entre ce salaire et des sommes qui seraient dues à l’employeur pour des fournitures diverses (article L.3251-1 du Code du travail).

Parallèlement, la valorisation de l’AEN équivaut à l’évaluation de la part de l’utilisation privative d’un véhicule dans son utilisation totale. L’article 3 de l’arrêté du 25 février 2025 fixe des méthodes de calcul appliquées au titre de l’avantage « constitué par l’utilisation privée du véhicule ».

Au regard de ces éléments, si une entreprise sollicite d’un salarié une redevance d’un montant supérieur à la valeur de l’avantage en nature, cela revient pour le salarié à financer une partie de l’utilisation professionnelle de son véhicule. Or, comme indiqué ci-dessus, l’employeur a l’obligation de financer lui-même les frais liés à l’activité professionnelle, sans pouvoir imputer au salarié ou laisser à sa charge des frais professionnels – ni par un paiement ni par un prélèvement sur salaire.

Aussi, les motifs invoqués à l’appui de l’augmentation de la participation du salarié ne peuvent valider celle-ci :

  • Il n’est pas possible de mettre à la charge d’un salarié des frais de gestion administrative d’une entreprise – en l’occurrence les frais de gestion d’un parc automobile. Plus généralement, une société ne peut pas réaliser un profit auprès des salariés par la mise à disposition d’un avantage en nature ;
  • L’augmentation du coût des véhicules résulte d’une règle légale dont le salarié ne peut être responsable.

Au regard de ces éléments, un salarié à qui serait imputée une redevance supérieure à la valeur de l’avantage en nature véhicule pourrait solliciter la restitution de l’excédent versé. »

 

Retrouvez ici le chapitre du Bulletin Officiel de la Sécurité Sociale relatif aux avantages en nature des véhicules.

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